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Initiatives

Grandir librement

Qui êtes-vous Ève Herrmann ?

J’ai grandi en Corse, où je suis née. Mes deux parents sont venus de Suisse s’installer dans un écrin de verdure, au milieu de la nature sauvage. J’ai « poussé » là, un peu à l’écart de la société de consommation, dans un environnement très protégé et naturel. À 18 ans, je suis retournée en Suisse faire des études de graphisme. Après mon diplôme, j’ai travaillé d’abord en agence, mais très rapidement je me suis rendu compte que je n’étais pas faite pour être employée. Je me suis installée en free-lance et j’ai rencontré mon mari, graphiste free-lance lui aussi. Nous avons travaillé de nombreuses années ensemble.

Qu’est-ce qui vous a fait changer de voie ?
Pour ma fille aînée, Liv, j’ai démarré un blog – uniquement des photos à partager avec la famille, au départ.

Mais, très vite, j’ai commencé à y écrire et j’y ai pris goût. Parallèlement, je me suis passionnée pour l’approche Montessori, mais, en 2007, Montessori pour les enfants de 0 à 3 ans n’était pas aussi répandu qu’aujourd’hui et j’ai dû beaucoup fouiller, lire en anglais et en italien pour trouver des pistes ! C’est ce que j’ai partagé sur mon blog, accompagné de photographies. J’ai rencontré alors un public de lecteurs intéressés et curieux et cela m’a encouragée à continuer.

Quelques années et une seconde fille plus tard, les éditions Nathan m’ont contactée pour illustrer un livre sur Montessori et les bébés avec mes photos. J’ai continué avec l’écriture de 2 livres, la conception d’un cahier d’activités et de nombreux coffrets de matériel. C’est une très belle collaboration qui se pour- suit aujourd’hui. Pour mon livre sur ma démarche de maman et ma vision de l’enfant, ce sont les éditions Solar qui m’ont approchée. Je crois à la synchronicité des événements ! Cette proposition arrivait au bon moment : ce livre était prêt dans ma tête depuis longtemps, il fallait qu’il voie le jour.

Pourquoi avoir décidé de déscolariser vos deux filles, Liv et Emy ?

Les filles avaient commencé à l’école Montessori avant notre déménagement. Arrivés à Lyon, faute de place dans des écoles à pédagogies différentes, nous les avons inscrites dans une petite école privée du quartier, très bienveillante. Les filles s’y sont senties assez bien d’ailleurs. Toutefois, la pédagogie (où l’enfant apprend ce qu’on lui demande, suit le maître et n’est pas moteur de ses apprentissages) a commencé à me peser. De plus, nous nous sentions malmenés par les horaires à respecter. Nous étions tous les deux travailleurs indépendants à la mai- son, organisant notre temps comme nous le souhaitions, en fonction de nos besoins et de notre rythme propre, et nous devions forcer nos filles à se lever le matin, à se dépêcher de déjeuner, à se préparer pour ne pas être en retard à l’école. À midi, rebelote : aller les chercher, rentrer manger, repartir… Elles avaient envie de se poser et de s’amuser un peu, mais le temps jouait contre elles. Il y avait une incohérence dans le fait d’imposer à nos filles ce que nous avions refusé pour nous ! Ce sont les deux raisons principales qui nous ont amenés à faire ce choix de la déscolarisation : la pédagogie et le rythme. Nous voulions vivre ensemble, à notre rythme et à notre idée.

Vous parlez dans votre livre de l’importance pour les parents de savoir observer leurs enfants. Pouvez-vous développer ?

C’est de l’observation des enfants qu’est née la pédagogie développée par Maria Montessori. Elle disait qu’elle n’avait rien inventé, que les enfants lui avaient tout montré. Observer son enfant, c’est se mettre en retrait, en dehors de l’action ; c’est se retenir d’agir pour voir davantage, pour comprendre où il en est dans son développement. Les parents ont le sentiment qu’ils doivent toujours faire quelque cho- se pour leur enfant : lui apprendre, le guider, le stimuler d’une part, le corriger, le contrôler de l’autre…

Qu’entendez-vous par «une aide juste» ?

C’est aider, sans faire à la place de l’enfant. Cela rejoint la question de l’observation. Pour nous, les adultes, c’est plus dur de ne pas inter- venir pour aider un enfant, car nous « savons » et nous avons le sentiment que c’est notre devoir de lui apprendre, de l’aider. Mais un enfant qui essaie (en se plaignant ou en nous lançant des regards en coin) n’a pas forcément besoin d’aide. C’est peut- être juste un peu d’attention qu’il demande : des encouragements mais pas une intervention, ou alors en ne faisant qu’un tout petit peu, juste ce qu’il faut pour que l’enfant puisse continuer par lui-même. Je me souviens de ma fille qui voulait s’habiller seule, mais c’était encore un peu difficile pour elle. Je lui tendais ses vêtements dans le bon sens, prêts à être enfilés. Cela l’aidait que je fasse juste une partie de l’action difficile, mais elle n’aurait pas accepté que je l’habille sans qu’elle puisse participer.

Vous expliquez également que l’enfant apprend par lui-même. Cela veut-il dire qu’ il n’ a pas besoin de maître ?

L’enfant apprend par lui-même, de la même façon qu’il apprend à par- ler, à marcher, à courir… Il est mû par un désir de comprendre le monde, et si nous ne venons pas en travers de cette envie de découverte, il continuera d’apprendre de cette manière naturelle. Ce sont les adultes qui séparent apprendre et jouer, vivre et apprendre, alors que pour l’enfant tout est imbriqué. Mais si l’enfant n’a pas besoin d’un maître qui dirige et décide de ce qu’il doit apprendre et à quel moment, il a besoin d’un adulte qui lui montre le chemin, qui lui offre à voir le monde, qui l’aide à répondre à ses questions incessantes et à assouvir sa curiosité. C’est le rôle de l’éducateur dans une classe Montes- sori : il prépare le terrain, montre et remontre, remet de l’ordre et se fait oublier.

Est-ce possible de laisser un enfant grandir librement sans qu’ il devienne allergique à la frustration ?

Si nos enfants « libres » rencontrent moins de situations où ils sont dirigés par des adultes, cela ne veut pas dire pour autant qu’il n’y a pas de règles. Nous ne laissons pas nos filles faire tout ce qu’elles veulent. Comme je le leur explique, nous sommes libres, dans la mesure où cela n’entre pas en conflit avec la vie autour de nous, qu’elle soit humaine, animale ou végétale.

Cependant, nous sommes beaucoup moins directifs que dans une famille plus classique. Un enfant qui grandit « librement » apprend par lui-même, au fil des situations, à gérer sa volonté, à la suivre ou non et à temporiser ses désirs. Il mettra peut-être plus de temps à développer sa volonté et à maîtriser ses pulsions et ses frustrations, mais il aura la chance de pouvoir faire pour lui-même, sans que l’ordre vienne toujours de l’extérieur. Ce n’est pas un chemin facile, et il y a peut-être plus de discussions et de négociations au sein des familles de notre type.

Comment garder chez un enfant scolarisé l’enthousiasme et la curiosité d’apprendre ?
Je pense que nous pouvons l’aider en nous intéressant à lui, à ses idées, à ses passions, en l’aidant à les développer et en montrant nous-mêmes de l’enthousiasme et de la curiosité pour le monde qui nous entoure. Souvent, être ce que nous souhai- terions voir chez nos enfants est un bon départ. Si les parents sont blasés et manquent d’enthousiasme, il sera plus difficile pour l’enfant de le conserver.

Quelles sont les 3 choses essentielles que tout parent devrait savoir ?

C’est une question difficile, mais voici 3 vérités qui me semblent essentielles : 1. L’enfant est un être capa- ble ; il veut apprendre par lui-même et faire par lui-même. Il faut respecter ce besoin naturel. 2. L’enfant n’a pas besoin d’être modelé par l’adulte pour devenir quelqu’un de bien : il est déjà quelqu’un de bien ! 3. Et, enfin, quand l’enfant se rebelle, il ne souhaite pas embêter ses parents ni les faire enrager. Il dit simplement que ses besoins ne sont pas écoutés. Comment nous sentons-nous quand nos besoins ne sont pas écoutés ?

 

Commentaires

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